DE L’AUTRE CÔTÉ DES GRATTE-CIEL
[ FESTIVAL DE RÉOUVERTURE ]
15:00 – 20:00
Le naufrage de la mer
C ‘est à Kos, face à la Turquie dont on voit les côtes, que j’ai sculpté le premier os de seiche.
Il y en avait un peu sur la plage et je n’avais qu’un petit canif comme outil de voyage.
La mer Égée faisait un doux bruissement.
La nuit, d’autres bruits arrivaient jusqu’à ma chambre : des voies étouffées? un clapotis sur le rivage?
A l’aube, le personnel des hôtels nettoyait la plage. Mon hôte me rassura, oui il y avait des traversées de clandestins, mais ils étaient accueillis et chaleureusement pris en charge.
Plus tard, j’ai vu à la télévision cette image qui noue le ventre : des gardes côtes repoussant des gens dans la mer à l’aide de perches.
Sur l’île d’Oléron, les plages de mon enfance ont reculé de plusieurs centaines de mètres.
Les dunes ont disparu, le sable étouffe les pins, la marée grignote chaque jour un mur de terre d’où sortent des racines.
Une vielle décharge des années 60 s’ est répandue dans la mer.
En hiver, des oies Bernache joyeuses marchent sur le gazole.
La mer réussit à rester belle et fascinante.
Y aura t- il assez d’ hommes libres pour la chérir?
Cécile Gagnon
Cécile Gagnon est née en 1950. Plasticienne et psychanalyste elle vit et travaille dans la région
de Clermont-Ferrand.
Les processus d’élaboration de nos sentiments d’empathie et de compassion sont au centre de ses recherches. À travers ses créations, elle interroge notre humanité, joue avec les paradoxes du vivant, souligne le dilemme moral de l’existence.
Si son travail pointe les souffrances et la cruauté de notre état d’être vivant, c’est pour mieux faire émerger la force démesurée de l’élan de vie et la pluralité de nos modes de construction/reconstruction.